Thursday, May 16, 2013

India Song

Monday, January 14, 2013

Commissariat : Christine Shimizu-Huet, conservateur en chef,directrice du musée Cernuschi Loan de Fontbrune, commissaire invité A la suite des premiers explorateurs français qui avaient parcouru les contrées du sud-est asiatique, comme Francis Garnier (1864), des voyageurs et des peintres français s’aventurèrent à partir de la seconde moitié du XIXe siècle dans les toutes jeunes colonies françaises. Ils en rapportèrent des aquarelles et des peintures, saisissant avec un regard juste des lieux jusque là seulement imaginés comme paradisiaques. Depuis Hanoï construite sur la rive droite du fleuve Rouge, dans le nord du Viêt Nam (ancien Tonkin) jusqu’à Saigon et au fleuve Mékong dans le sud (ancienne Cochinchine), les hommes et les monuments suscitèrent leur intérêt.

Friday, January 11, 2013

Au début du XXe siècle, l’Etat français encouragea des artistes à enseigner et à établir des écoles d’art dans ce pays comme dans ses autres colonies. En 1910, il créa le Prix de l’Indochine qui offrit à des artistes français une bourse en Indochine. Cette présence artistique contribua à l’ouverture en 1924 de l’Ecole des beaux-arts de Hanoï, sous la direction du peintre Victor Tardieu, appuyé par un jeune vietnamien, Nguyễn Nam Sơn.
L’Ecole accueillit de nombreux professeurs qui formèrent les artistes indochinois aux techniques occidentales: architecture, peinture, sculpture, arts appliqués. Des écoles d’arts appliqués furent également créées, certaines plus particulièrement spécialisées dans des domaines artistiques : l’Ecole de Thủ Dầu Một (1901) dans l’ébénisterie et le laque, l’Ecole de Biên Hoà (1903) dans la fonderie d’art et la céramique, l’Ecole de Gia Ðịnh (1913) dans le dessin et la gravure. Parmi les professeurs qui contribuèrent à la mise en place d’un nouveau style, il faut mentionner Joseph Inguimberty, Evariste Jonchère, André Maire, Alix Aymé, Louis Bâte.
Les artistes qui sortirent diplômés de l’Ecole de Hanoï adoptèrent une facture réaliste basée sur l’utilisation de la perspective linéaire et la recherche de volumes. Les scènes, souvent intimistes, qu’ils dépeignirent nous livrent un regard sensible sur la vie contemporaine où la femme occupe une place souvent centrale. Les uns s’exprimèrent sur des supports traditionnels comme la soie, d’autres optèrent pour la peinture à l’huile. Nguyễn Gia Trí développa la technique de la peinture en laque poncée.
Un décret du 11 novembre 1887 crée l’Indochine française. Cet immense territoire englobe le Tonkin (actuel nord Việt Nam), arrosé par le fleuve Rouge, l’Annam (centre Việt Nam) et la Cochinchine (sud Việt Nam), irriguée par le delta du Mékong, mais aussi le Cambodge et plus tardivement le Laos.
Succédant aux missionnaires comme le Père Alexandre de Rhodes au XVIIème siècle et l’évêque Pigneau de Béhaine au XVIIIème siècle, des amiraux français conduisent des expéditions au milieu du XIXème siècle en Asie du sud-est. Dans cette perspective, en 1866, le capitaine de frégate Ernest Doudart de Lagrée (1823-1868), explorateur passionné d’archéologie, conduit une mission scientifique à partir de Sài Gòn à la recherche des sources du Mékong : Francis Garnier (1866-1868) et le dessinateur Louis Delaporte (1842-1925), futur directeur du musée indochinois du Trocadéro, y prennent part.
Quelques années plus tard (1875-1877), le médecin explorateur, Jules Harmand (1845-1921), révèle les hauts plateaux de l’Annam et les spécificités de ses populations montagnardes. Ces récits, tout comme ceux de Henri Mouhot (1858-1860) qui redécouvre Angkor, suscitent l’intérêt des Français. La présentation d’une section indochinoise confiée à Jules Harmand, à l’Exposition universelle de Paris de 1878 accroit la curiosité des Français.
Les expositions coloniales de Marseille de 1906 et de 1922 suscitent la curiosité des artistes français pour ces nouvelles colonies. Plus lointains que le Maghreb de Delacroix ou la Turquie d'Ingres, les tropiques et leurs civilisations exercent un nouvel attrait.
Dans les premières années du XXe siècle, des écoles d'arts sont ouvertes à Hanoï et à Saigon (actuelle Hồ Chí Minh Ville), mais elles sont destinées à former des artisans.
Le 27 octobre 1924, le gouvernement français publie une ordonnance décidant de la création d'une Ecole des beaux-arts de l’Indochine (E.D.B.A.I.). Celle-ci doit être intégrée à l’Université indochinoise de Hanoï. Elle ne verra le jour qu’en 1925. Cette école propose un cursus complet fondé sur le modèle de celui de l’Ecole des beaux-arts de Paris. Elle est destinée à accueillir des étudiants venus de toutes les régions de l’Indochine (actuels Việt Nam, Laos et Cambodge). Cependant, la majorité d'entre eux est originaire de Hanoï et de ses environs. La création de l'E.D.B.A.I. marque un tournant décisif dans le processus d'élaboration de l'art moderne vietnamien. Elle est principalement le fait d'un homme, Victor Tardieu (1870-1937), peintre lyonnais qui, après des études aux beaux-arts de Paris et un passage dans les ateliers d’Albert Maignan et de Léon Bonnat, reçoit le prix de l'Indochine en 1920.
La laque poncée (sỏn mài) Le Việt Nam, à l’égal d’autres pays asiatiques, possède une longue tradition du travail de la laque remontant au IVe siècle avant notre ère. Elle rehaussait en particulier depuis le XVe siècle, les décors des temples et des palais, les statues et les objets de culte. La laque vietnamienne est obtenue à partir de la sève d’un arbre de la famille des Anarcadaciées, hautement toxique, le Rhus Succedanea. Celui-ci croît dans les provinces voisines du fleuve Rouge (Phú Thọ, Vĩnh Yên). La mode des laques en France dans les années 1920, à la suite de Jean Dunand (1877-1942), influe considérablement sur le développement des laques au Viêt Nam dans les années 30. La poudre et les feuilles d’or ou d’argent, les coquilles d’oeuf, la nacre apportent des touches lumineuses aux compositions. Les artistes, souvent polyvalents, peintres, dessinateurs et laqueurs, créent des panneaux décoratifs, imitant les formats des peintures à l’huile, et dépeignent des scènes de la vie locale. Nguyễn Gia Trí (1909-1993) est une figure phare de ce renouveau suivi par des artistes tels que Lê Thy (né en 1919), Nguyễn Thành Lễ (né en 1919), Nguyễn Quang Bảo (né en 1929), présentés dans l’exposition. La peinture sur laque poncée devient un art plastique spécifiquement vietnamien qui permet à l’artiste, tout en se soumettant aux exigences et aux caprices de la matière, d’exprimer ses propres sentiments.
Bâte Louis (1898-1948) Elève de Leroux à l’école des beaux-arts de Bordeaux, puis de Jules Coutan et Paul Landowski à l’Ecole des beaux-arts de Paris. Grand prix de Rome de sculpture (1927), Louis Bâte obtint le Prix de l’Indochine en 1938. Il enseigna le dessin à l’Ecole d’Architecture de Ðà Lạt et fut nommé directeur de l’Ecole d’arts appliqués de Gia Ðịnh (1942-1947).
Boullard-Devé Marie-Antoinette (1890-1970) Elève de Frédéric Humbert, Marie-Antoinette Boullard-Devé reçut le Prix de la Compagnie de la navigation mixte (1921). Elle décora le pavillon d’Angkor à l’Exposition nationale coloniale de Marseille (1922) et participa à l’Exposition coloniale internationale de Paris (1931).
Dabadie Henri (1867-1949) Elève d’Elie Delaunay, Henri Lévy, Bonnat et Gustave Moreau à l’Ecole des beaux-arts de Paris, Henri Dabadie obtint le Prix de l’Indochine (1928) et enseigna à l’Ecole des beaux-arts de l’Indochine.
Lê Phổ (1907-2001) Fils du vice-roi du Tonkin, sous le protectorat français, Lê Phổ, après des études à l’école professionnelle de Hanoï, obtint le diplôme de l’Ecole des beaux-arts de l’Indochine. Il fut détaché auprès du commissaire de l’Indochine à l’Exposition coloniale internationale de Paris (1931) et suivit pendant une année les cours de l’Ecole des beaux-arts de Paris. De retour au Viêt Nam, il fut professeur de dessin au lycée Albert Sarraut de Hanoï, puis à l’Ecole des beaux-arts de l’Indochine (1933). Il revint en France lors de sa nomination en tant que directeur artistique de la section Indochine de l’Exposition internationale des arts et techniques dans la vie moderne (1937) et s’installa définitivement à Paris.
Lê Văn Ðệ (1906-1966) Né à Bến Tre (Sud Viêt Nam), Lê Văn Ðê sortit major de la première promotion de l’Ecole des beaux-arts de l’Indochine. Il obtint une bourse d’études pour l’Ecole des beaux-arts de Paris (Atelier Jean-Pierre Laurens) et poursuivit ses études à Rome et à Athènes. Il participa à l’Exposition coloniale internationale de Paris (1931) et à l’Exposition internationale d’art colonial de Rome (1931). Responsable des arts asiatiques à l’Exposition internationale de la presse catholique à Rome en 1936, il fut directeur de l’Ecole des beaux-arts de Saigon (1954-1966).
Lương Xuân Nhị (1914-2006) Originaire de Hanoï, Luong Xuân Nhị étudia auprès de Nam Sơn à l’Ecole des beaux-arts de l’Indochine dont il fut diplômé en 1937. Il reçut la médaille d’or au salon de la Société annamite d’encouragement à l’art et à l’industrie (Hanoï, 1936). Après un séjour de deux ans en U.R.S.S., il modifia son travail jusque là impressionniste et l’orienta vers un réalisme social. Il fut professeur à l’Ecole supérieure des beaux-arts du Viêt Nam (1955-1981).
Nguyễn Phan Chánh (1892-1984) Né dans une modeste famille de lettrés de la province de Hà Tĩnh, Nguyễn Phan Chánh commença sa carrière en enseignant dans une école primaire. En 1925, il intégra la première promotion de l’Ecole des beaux-arts de l’Indochine, il fut le seul candidat retenu venant du centre Viêt Nam. Pionnier de la peinture vietnamienne moderne, il mit au point des procédés picturaux combinant les techniques occidentales et la soie extrême-orientale. Son oeuvre retint l’attention des spécialistes à l’Exposition coloniale internationale de Paris (1931). Il fut professeur à l’Ecole des beaux-arts de l’Indochine, puis au Lycée du protectorat à Hanoï (1931-1932). Il reçut à titre posthume en 1996 le Prix Hồ Chí Minh de l’art et de la littérature.